Jarry, symptôme drole, cas atypique !

935100_455808871163893_1398281678_nJarry est l’un des nouveaux visage de l’humour français. Actuellement au théâtre Trévise jusqu’à la fin du mois et ensuite en tournée dans toute la France, il présente son deuxième spectacle « Atypique ». Et il porte bien son nom car Jarry ne ressemble à personne ! Et c’est tant mieux. Il le dit lui même, Jarry serait insupportable dans la vraie vie. Dans la vraie vie, peut-être, mais sur scène, il ne boude pas son plaisir et nous non plus.

Jarry (ou son personnage, qui sait ?) est une véritable boule d’énergie. Il arrive sur la scène comme une jeune fille en fleur, temple d’innocence pour rapidement briser la glace. Il parvient à sortir avec la candeur la plus charmante les blagues les plus salaces qui font scandale dans les chaumières. Mais sa joie de vivre est à toute épreuve  et son optimisme contagieux. Ne manquant jamais d’interragir avec le public, il fait preuve d’une répartie redoutable et tout le monde en prend pour son grade. Sans complexes, sans limites, au delà, d’être atypique, Jarry est unique. Si on certains pourraient être tentés de dire qu’il ne s’agit là que de l’humoriste « pro-mariage pour tous » du moment, il est impossible malgré tout de ne ranger Jarry que dans la case « humoriste LGBT » car son univers va au-delà de toute frontière.

Rencontre avec le bol d’air frais de l’humour français (attention, certaines phrases sont évidemment à prendre au 69ème degrès).

 

Qui es tu ?

Qui je suis ? Je suis un garçon, né prématuré à la suite d’un accident de voiture au mois d’aout, le 5 aout de l’année biiiip 77. Je suis un comédien et je suis amour. Je dois apprendre à répondre à cette question. C’est en cours (rires). Je suis un zébulon. Je suis un jeune dans l’ère du temps. J’aime les gens. J’aime rire, j’aime l’absurde. J’aime que chaque seconde soit un renouveau perpétuel.

Tu te définis plutôt comédien qu’humoriste ?

Oui, je pense que je suis comédien, enfin, j’en suis même sur depuis que je suis né. Parce là, Jarry, c’est un personnage qui reste très proche de ce que je suis mais ça reste un personnage. Il y a quand même une distanciation. Et heureusement pour moi et pour les gens sinon ce serait pénible de rencontrer Jarry dans la vie de tous les jours. Trop d’énergie (rires). Comédien, parce que j’ai envie de jouer d’autres choses. Et ce qui est le rêve de chaque comédien, c’est d’être au service du jeu et d’interpréter. J’espère d’ailleurs faire de films porno très prochainement qu’on tournerait dans un pizzeria.

Tu aimerais t’essayer à d’autres registres ?

J’en fais déjà. Je viens du théâtre classique. J’ai joué pendant pas mal d’années des pièces sur la mythologie grecque. J’ai joué beaucoup de Molière, des choses un peu chiantes. Je suis venu à l’humour vraiment malgré moi, un peu par hasard. Et c’est vrai que je suis plutôt d’une nature joyeuse dans la vie et c’est venu un peu  naturellement. Mais oui, j’aimerais bien jouer un rôle de psychopathe. J’aimerais jouer des choses plus dures. J’adorerais jouer un mec du GIGN qui va à la guerre. 100% mâle.

Y a t-il eu un événement déclic qui a fait que tu as voulu devenir comédien ?

Oui, je me suis fais violer à l’âge de 8 ans par un comédien assez talentueux et j’ai senti à l’intérieur de moi toute la transmission du métier (rires). Depuis que je suis tout petit, je fait de la danse. Et très vite, j’ai eu envie de mettre des mots sur les mouvements que je faisais dans ma chambre. Parce que j’ai vraiment appris dans ma chambre. Et très vite, quand j’ai compris la force des mots, j’ai eu envie de jouer. Et aussi parce que pour moi, c’était une manière de rêver ma vie, de fantasmer ma vie dans cette chambre d’enfant. Ca me permettait de me sortir de mon quotidien et de me faire des films : j’étais un jour un dangereux criminel recherché par la CIA. Je me cachais dans mon armoire et je me faisais des films. J’ai toujours eu ce besoin de jouer parce que je pense que le jeu, quel que soit le pays où t’es, c’est vraiment ce qui te permet de rêver et de sortir de ce que t’es. On dit tout le temps qu’en prison, la seule chose qu’on te prend pas, c’est tes rêves. Le jeu permet ça.

Est ce que tu te souviens de ta première expérience scène ?

J’ai eu mon premier rapport sexuel à… (rires). Ma première expérience scène, je m’en souviens très bien. Je jouais L’ours de Tchekhov. J’avais 13 ans. J’étais au collège et je devais amener une cruche d’eau sur scène. J’étais très timide à l’époque et mon professeur de français m’avait demandé juste de faire cette apparition qui était d’ammener une cruche d’eau et de ressortir. J’ai eu tellement peur que j’ai fait tomber la cruche d’eau par terre et la salle a rigolé. Ca a changé ma vie. L’année d’après, j’avais le premier rôle. Je me suis dit : « ah ouais, je peux faire rire les gens ». Ca a été vraiment quelque chose d’incroyable pour moi.

Tu collabore avec beaucoup d’autres humoristes.

Ouais, tous des enculés. (rires)

Est ce que tu peux m’en parler ?

Jeff Panacloc et Jean Marc, le ventriloque, je les ai rencontré il y a maintenant 3 ans, au festival Juste Pour Rire de Montréal. Je partageais mon appartement avec Jeff, on se connaissait pas et ça a été une vraie rencontre amicale. Il ya deux  ans, il m’a demandé de mettre en scène son spectacle. Et là, on a créé des choses ensemble et aujourd’hui, c’est le succès qu’on sait tous. Et ça reste quelqu’un pour qui j’ai énormément de tendresse. C’est évidemment à l’opposé de ce que je fais donc j’ai eu plaisir à nourrir cet univers. Elisabeth Buffet, je l’ai rencontrée il y a deux ans. Il ya un an et demi, elle me propose de bosser sur un de ses sketch, l’entrée de son spectacle qui était très dansée et d’utiliser mes compétences de danseur. Et puis la travail étant, la fusion étant, on a eu envie de faire tout le spectacle ensemble. Et c’est aujourd’hui une très belle rencontre. C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup qui est aussi dans un univers dans lequel je ne suis pas du tout. Charlotte Gabris que je connais depuis 4 ans, qui est la petite suissesse cynique que j’aime profondément, que je considère un peu comme ma petite sœur. J’ai besoin d’aimer les gens pour travailler avec eux parce que c’est tellement de doutes, c’est tellement d’angoisse que si on aime pas, on tient pas. C’est comme une relation de couple en fait : si t’aimes plus ta femme, tu vas te tirer ailleurs.

Comment est né le spectacle « Atypique » ?

Je cherchais l’idée d’un spectacle. Et un jour, en allant à Pôle Emploi, mon conseiller me dit : « j’ai un métier de boucher pour vous. » Je lui dis : « mais je suis comédien. » Et il me dit : « vous savez, on est ammené à changer 7 fois de métier dans notre vie donc faut pas faire le capricieux, faut prendre ce qu’on vous offre. » Je suis rentré chez moi et je me suis dit : « 7 métiers en moyenne, ça c’est intéressant. » On nous fait chier à faire des études pour faire un truc alors qu’on sait qu’en moyenne, on va changer 7 fois. Du coup, j’ai écrit des noms de métiers que je suis allé tester et le spectacle est né comme ça. Je suis vraiment allé tester tous les métiers que j’interprète. Certains se posent des questions sur la réalité mais c’est vrai et j’espère qu’un jour, je pourrais faire un reportage sur tous les gens que j’ai rencontré dans ces métiers là parce que  c’était une vraie démarche de ma part. Et je suis quelqu’un qui a besoin d’être en immersion pour écrire donc le spectacle est vraiment né comme ça.

Pourquoi « Atypique » ?

Quand je cherchais un nom de spectacle, au départ, je voulais mettre « Les 101 métiers de Jarry » ou « le tour du monde des métiers », j’avais plein de noms pourris. Et surtout je me suis dit qu’il fallait que je définisse mon spectacle. Et j’arrivais pas à le définir. En France, quand on arrive pas à définir quelque chose, on dit que c’est atypique.

Quel est la différence entre ton 1er et 2e spectacle ?

Le premier était pas du tout de l’humour. C’était vraiment une introspection. C’était un spectacle sur mon parcours depuis mon enfance, beaucoup plus intimiste. C’était un seul en scène et au bout d’un certain temps, je me suis rendu compte que ça me faisait pas du bien de parler de choses qui étaient derrière moi et que j’avais plutôt envie de parler de choses qui étaient devant, d’où ma nature optimiste.

Le personnage est-il réel et les situations sont elles vécues ?

Il l’est ! C’est drôle cette question sur la réalité et la fiction parce que les deux s’épousent. Même nous, dans notre vie, on est quand même dans une fiction.

Tu as quelques expériences au cinéma…

J’ai fait des petites apparitions. J’ai au cette chance là de faire ça. Mais j’aime beaucoup. C’est un autre exercice, c’est rigolo.

Est ce que tu veux rester artiste de la scène ou est ce que tu voudrais passer au cinéma ?

Je n’appartiens à rien et personne ne m’appartient. J’irais là où mes envies me conduisent, là où on me rêve, là où on me voit. Moi, ce que je veux, c’est vivre des aventures. Que ce soit sur scène, devant une caméra, au milieu du désert, sur une île… j’irais là où il y a quelque chose à vivre. Pour moi, c’est ça l’important.

As tu essayé de te faire un chemin par la télévision ?

Pas en tant qu’humoriste. En tant qu’invité pour parler de mon actualité mais après, on a toujours pris le parti de pas faire d’émission dans lesquelles les humoristes se mettent en avant parce que du coup, j’ai envie de garder ma particularité et de ne pas faire ce que les autres font. Donc c’est plus long mais c’est bon.

Penses tu qu’aujourd’hui, on peut rire de tout ?

Je pense qu’aujourd’hui, on peut rire de tout mais on peut pas le dire n’importe comment. Je pense que c’est la grande différence. C’est pour moi le même débat que la fessée sur un enfant. Est ce qu’on peut punir un enfant ? La réponse est oui, on peut le punir mais comment on le punit, c’est là la vraie question. Donc oui, on peut rire de tout. On est quand même le pays de la liberté d’expression et quand on voyage dans le monde, on se rend compte de la chance qu’on a. Mais c’est surtout comment on en parle, la manière dont on le fait. On reste des humoristes. On reste des gens avec des visions. On est pas une vérité absolue. Donc il faut faire très attention que la parole ne devienne pas autre chose.

Dernière question, quels sont tes projets ?

J’aimerais partir en vacance cet été plonger un peu, faire de la plongée sous marine. J’ai bien l’intention de mettre une ou deux cartouches la semaine prochaine (rires). Mes projets, c’est de revenir à la rentrée avec le spectacle Atypique, avec deux-trois petits changements à l’intérieur. Faire un peu plus de TV. Je fais les émissions sur TMC, Canapé Quizz en ce moment qui sont tous les soirs à 19h45 avec que de potes : Jeremy Ferrari, Arnaud Tsamère etc. J’ai envie de faire plus de fictions. Et puis, j’ai envie de continuer à agrandir cette famille, les gens qui m’entourent et qu’on aille vers un truc qui va nous nourrir et nous satisfaire pleinement… Pas de questions sur les pédés ?

Interview réalisée par Albin Duvert

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